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L’AVORTEMENT OU LA LÂCHETE DES HOMMES

Voici un texte très récent de Serge Rezvani

Cet article a été reçu et accepté avec enthousiasme par les rédactrices du journal Le Monde. Mais, alors qu’il était déjà en composition pour publication dans les colonnes du journal, les hommes de la rédaction du Monde l’ont censuré et refusé sa diffusion, ce texte n’y paraîtra donc finalement pas...

Libre à chacun de le partager.


L’AVORTEMENT OU LA LÂCHETE DES HOMMES


Et voilà ! Aujourd’hui nous sommes huit milliards sur le radeau ! Et, comme les fameux grains de riz du jeu d’échec, c’est par bonds de plus en plus considérables que nous risquons de l’alourdir jusqu’à le couler. Reste à légaliser, si ce n’est à encourager, l’avortement. Seul moyen - je dirais symbolique - en attendant la mainmise de l’homme sur l’utérus artificiel, pour maîtriser une multiplication qu’instinctivement nous savons porteuse d’extinction plus que de vie. Sans en avoir décrypté les processus, les biologistes ont découvert qu’en toutes biomasses vivantes existe une sorte de compteur régulateur des naissances. On le sait par le biologiste Jean Rostand, que pour les grenouilles, par exemple, quand dans une mare un certain quota de têtards est dépassé, une sélection hormonale se débarrasse des excédentaires. De même les étourneaux, qui le soir se réunissent par milliers sur quelques arbres. C’est par le niveau d’assourdissement en décibels émis par leurs piaillements que se régulent leurs pontes. Chaque espèce, par des moyens souvent inattendus, possède ce sens du nombre à ne pas dépasser. Aussi bien chez les insectes que chez les vertébrés, ce processus de régulation fonctionne mystérieusement.


Et de même, bien que si loin de l’Origine, c’est à croire que l’espèce humaine possède aussi à son insu ce « compteur » (en train de devenir planétaire ?) au point que même l’esprit patriarcal, si jaloux de ses prérogatives, cède peu à peu (instinctivement ?) à cette loi qui l’oblige, bien à contre-cœur, sous peine de disparition par excès du nombre, à légaliser l’avortement. Ce qui personnellement me choque, car je trouve insupportable que les femmes d’aujourd’hui quémandent auprès des hommes le droit à l’avortement. C’est sous une forme insidieuse admettre l’indestructible prédominance masculine jusque dans les recoins secrets, non seulement de l’appareil génital féminin, mais du cerveau féminin. J’entends les réactions scandalisées ! Faut-il être fou et insultant pour affirmer que ce n’est pas aux femmes d’avorter, mais aux hommes d’êtres responsables ? Aux hommes de ne pas être incontinents ? Je suis pour la vasectomie. Et même, autour de la quarantaine, je l’ai mise en pratique à la suite d’un avortement de la femme aimée. Donc j’estime que j’ai droit à la parole sur ce sujet. Oui, je suis pour la vasectomie, et non pour l’avortement ! J’ai accepté qu’un chirurgien s’en prenne à mon sexe sacré ! Et ça ne m’a diminué en rien, rassurez-vous les mecs ! C’était quand même moins sanglant qu’un avortement, non ? Je trouve vraiment à la limite de l’acceptable… et même inacceptable que ce soit les femmes qui se font poser des stérilets, qui se font lier les trompes, qui se détraquent par la pilule, et qui pour finir se font avorter au vif de leurs chairs dans un incroyable irrespect de l’intégrité de leurs corps. Et elles revendiquent ce « privilège » avec des slogans stupides sur ce prétexte : « Notre corps nous appartient ? » Mais c’est faux ! Par l’avortement c’est bien la preuve qu’il appartient encore plus irrespectueusement que jamais à leurs hommes incontinents ! Puisqu’il faut réparer ! Et ces pervers se font prier pour accorder aux femmes la faveur de se faire cureter dans le vif - tout en s’apitoyant sur l’embryon assassiné ! Et ils prétendent aimer leurs femmes, tout en se débarrassant en leurs corps du trop-plein de leurs pulsions. On se retire, non ? On se protège, non ? On les protège, non ? On musèle le truc, non ? Le vagin d’une femme n’est pas une surverse, non ? À ce sujet je suis violent. Je suis outragé pour les femmes ! Je suis outragé qu’elles acceptent ce retournement au point de remercier cette « faveur » accordée par ceux qui jamais et à aucun instant ne se sentent injustes et coupables… mais magnanimes. Rien ne démontre plus clairement à quel point l’idéologie plurimillénaire du patriarcat gangrène encore le cerveau des femmes les plus intelligentes quand elles revendiquent le droit à l’intrusion du bistouri masculin en leurs corps, comme un acquis, alors que c’est l’homme qui s’est débarrassé en elles de son trop-plein. Et, non content de ce bref arrêt, ce même juge du ce qui est permis et du ce qui est non permis, continue à agrandir son territoire sexuel de l’une à l’autre en se foutant d’elles. Comment ont-elles pu ? Comment sont-elles encore si généreuses en prétendant que leur corps leur appartient quand plus que jamais il reste soumis aux conséquences de ces inconséquents ? Serait-ce qu’elles sont restées profondément mères envers le masculin ? Je le crois. Et que ces mères, malgré elles, finissent par tout passer - et même leurs incontinences - à ceux qui, sans qu’elles le sachent, sont restés viscéralement leurs enfants, leurs bourreaux. Et même chez les plus radicales des femmes « libérées », dans leur inconscient fémi…niste, leur enfant fantôme auquel on passe tout ! Puisqu’il est acquis, dans toutes les cultures, que le petit mâle a le droit d’être le « bourreau » de sa mère, de ses sœurs, de tout ce qui est féminin dans la tribu. Tant que l’insecte humain ne se sera pas extrait de son humanité, ce postulat restera fondamental dans l’inconscient masculin, bien sûr, mais surtout féminin. Bien ! De jour en jour, je m’avance vers la centaine ! Et c’est depuis cette proche centaine que j’écris libéré de ce qui en ce sujet, risquerait de freiner ma pensée. Vu mon âge, j’occupe avec tristesse une place particulière pour voir, m’interroger, comprendre, et risquer de m’exprimer.


« Je n’ai rien à gagner ou à perdre », pourrais-je écrire depuis les limbes que je n’écrirais pas autrement. Et si on s’offusque de ce que j’exprime, c’est qu’on m’admet encore ici, parmi les hommes. Et c’est tant mieux si on me le reproche ! Étrange sentiment de liberté ! Étrange solitude intellectuelle ! Toutes les femmes que j’ai aimées sont mortes dans mes bras. Et c’est dans l’échange avec leur intelligence que j’ai toujours trouvé le stimulant d’une pensée non univoque. La femme de ma vie est morte il y a dix-huit ans de cela et j’en souffre à chaque instant des jours vécus sans elle ! Et maintenant ? Où est mon pôle féminin ? Seul me reste du féminin fantasmé auquel dédier en esprit ces pages fantômes ? Quel cruel manque de la parole féminine en retour !


Serge Rezvani



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